Interfel ne se contente pas de représenter les producteurs de la filière fruits et légumes frais.
« Nous voulons mener une réflexion sur la consommation, les nouveaux produits et les nouveaux services », souligne Georges Daniel, président du jury Food Hackathon Fruits & Légumes frais de l'association interprofessionnelle.
Trois lauréats antigaspi
Tomogrow, des aromates cultivées dans les supermarchésImaginé par deux ingénieurs, Camille Ernould et Jérémie Delbart, le projet de cette start-up lilloise, lancé en janvier 2022, s'adresse à la grande distribution, aux commerces de proximité et même aux restaurants. C'est un système de microfermes, grâce auxquelles les consommateurs pourront cueillir directement leurs aromates sur place.
« Dans le commerce de proximité et la grande distribution, 30 % des produits frais sont jetés avant même d'arriver jusqu'aux consommateurs, en raison de problèmes logistiques ou de stockage, relève Camille Ernould, agronome et cofondatrice de Tomogrow. Pour les aromates, c'est même 70 % ! »
Dans des conteneurs maritimes réformés où les semis sont produits, une ferme mère, implantée au marché de gros de Lomme, près de Lille, sert à la production première. Puis les plantes sont distribuées localement, dans les micro-fermes, sortes de meubles sur roulettes autonomes. Déjà, dans les Hauts-de-France, plusieurs enseignes : Otera, Leclerc, Carrefour Market, Système U, Intermarché... ont adopté l'idée.
« Nous avons 83 commandes sur 2024 », indique en outre Jérémie Delbart.
Fans de circuits courts, les deux entrepreneurs sont aussi soucieux de la santé et de la souveraineté alimentaire.
« Nous ne travaillons qu'avec des graines non traitées et des semences françaises », indiquent-ils.
Food Index for Good, pour végétaliser l'assiette des restaurateurs
Élise Baron, la cofondatrice avec Eva Genel de Food Index for Good (FiG), association créée en 2020, en est convaincue. Les chefs cuisiniers sont devenus, au fil des émissions télé, « des influenceurs », dit-elle.
« En outre, 2 milliards de repas par an sont pris au restaurant en France », enchaîne-t-elle.
FiG commence déjà par proposer aux restaurateurs de calculer leur empreinte carbone, à l'aide d'un outil qui a reçu le soutien technique de l'Ademe et qui analyse les données récoltées (empreinte carbone de la viande, respect des saisons, approvisionnements en bio et en local, gestion des déchets et des invendus, sur la base de factures).
« L'outil chiffre également les gains financiers possibles et permet aux restaurateurs de se comparer à la concurrence », poursuit-elle.
Déjà, quelque 400 brasseries et établissements gastronomiques ont été accompagnés pour effectuer cette transition et plus de 200 ont reçu leur « badge FiG » qui met en valeur les professionnels écoresponsables grâce à un logo visible sur des plateformes de réservation partenaires.
« Les gains sont en fonction du temps passé à évoluer, relève Élise Baron. Nous avons des exemples où la réduction de l'empreinte carbone va jusqu'à 40 %, à laquelle s'ajoutent 20 % d'économies sur les achats de produits alimentaires et 15 % d'économies énergétiques, sans oublier l'impact positif sur les clients et les salariés. »
« L'accompagnement d'Interfel a été source d'inspiration », ajoute-t-elle. Que ce soit dans les premiers pas pour rééquilibrer l'assiette et y inclure davantage de végétaux ou pour donner des idées d'appellation de plats. « Si l'on écrit “boulettes végétariennes” sur la carte, on a peu de chances de séduire, mais si l'on parle de falafel, on apporte une vision plus exotique et plus positive », sourit-elle.
Des bananes qui se gâtent, des citrons qui se couvrent de moisissures... Les producteurs de ces fruits et agrumes, de même que d'autres, qui fournissent le marché en abricots et autres fruits à noyaux, s'inquiètent de ces phénomènes de maturation rapide. En abîmant les produits, ils rebutent les consommateurs ou participent au gaspillage alimentaire. C'est ce gâchis qui a incité, en 2022, un jeune ingénieur agronome d'AgroParisTech, Paul Malfoy, dirigeant et cofondateur, avec Valentin Sabatet et Benjamin Vignard, de Proteme, à agir.
« 40 % de la nourriture produite n'est jamais consommée, assure-t-il. Et c'est, en outre, 6 % de la consommation d'eau mondiale qui ne sert à rien. »
« Cette seconde peau est un biopolymère, composé uniquement de matériaux naturels, d'origine végétale ou fongique », poursuit-il.
Prévue pour la fin 2025, la commercialisation devra cependant passer un dernier obstacle.
« Tous les produits que nous utilisons pour notre solution sont acceptés par l'Europe, sauf un, qui n'est pas couvert. Nous nous efforçons de faire changer la réglementation et également d'homologuer notre solution », explique-t-il.
Il s'agira ensuite de choisir les producteurs, car cette pellicule a un coût, plus facilement absorbable par des produits déjà bien valorisés, comme les mangues ou les avocats.
Récompensée en 2022 par le Greentech Innovation du ministère de la Transition écologique, la start-up Proteme est aussi, entre autres, lauréate d'un programme France 2030, Innover pour réussir les transitions agroécologique et alimentaire.
Lys Zohin