Créno perd ses adhérents

L’été dernier, la moitié des membres du premier réseau de grossistes de l’hexagone ont choisi de prendre congé. En effet, sur les 52 entreprises membres du réseau qui pèse un bon milliard de chiffre d’affaires, 32 sont sur le départ. Dans un premier temps, la plupart d’entre elles étaient pressenties pour se rapprocher du réseau concurrent Hexagro.

Toutefois, certains pencheraient plutôt vers la création d’un nouveau groupement qui rassemblerait jusqu’à 29 des anciens crénistes. Les fondations du groupement Creno étaient déjà fragilisées lorsque Denis Le Saint a démissionné de la présidence du groupement qu’il occupait depuis 2011. Annoncée en décembre 2013, elle est devenue effective en juin 2014 et est parue au Bulletin officiel. Denis Le Saint codirige par ailleurs avec son frère le groupe éponyme qui pèse quasiment 300 millions d’euro de CA. L’entreprise familiale aux racines bretonnes étend maintenant son périmètre de la Normandie jusqu’aux confins de Midi Pyrénées.

Le collectif a ses limites

Outre le groupe Le Saint, Creno compte deux autre entités qui pèsent plus de 100 millions d’euros de CA. AFL (All Fresh Logistique) dont le CA total est proche de 200 millions, et Canaveze qui traite plus de 110 millions. Le réseau des Crénistes compte encore d’autres entreprises qui pèsent plus de 50 millions de CA : Ame Haslé en Normandie, Charlet dans le Nord et l’Est, Sapam dans l’Est et en Bourgogne, Mag’Fruit dans le Centre et le Val de Loire. Parmi les futurs ex Crénistes, seul Canaveze aurait choisi de rester indépendant.

Les raisons qui poussent au démantèlement partiel du premier réseau de grossistes français sont multiples. La raison d’être de Creno repose sur la solidarité, qu’elle soit commerciale pour répondre aux appels d’offre des gros comptes, surtout ceux de la restauration (RHF), ou bien financière pour sécuriser les fournisseurs. Mais le collectif a ses limites. Notamment lorsqu’il s’agit de partager les mêmes marques. Ou les risques, que ce soit au travers des bureaux d’achat dont le nombre s’est multiplié au fil des années. Sans oublier les inquiétudes liées à la solidité financière de certains partenaires.

En tout état de cause, cette forme larvée de collectivisation rampante n’est pas inscrite dans les gênes des grossistes. Il leur était d’autant plus difficile d’y gouter que la rivalité commerciale entre les membres du réseau s’est exacerbée. Au fil du temps, les petits grossistes des années 60 sont parfois devenus de grosses PME multi sites. Après avoir grossi en servant la grande distribution, ils leur a bien fallu manœuvrer pour compenser la perte de ce circuit. Certains couvrent maintenant plusieurs régions avec une gamme de produits de plus en plus diversifiée. Au métier de base de distributeur de fruits et légumes, qui est au mieux stable hors croissance externe, se sont ajoutés les produits de la mer et d’autres gammes liées à l’ultra frais, les fleurs et plantes, la logistique.

Quatre acteurs nationaux

Le leader Pomona, déjà très actif dans les surgelés et les produits de la mer, livre aussi des produits d’épicerie, de la viande et toute une gamme destinée aux métiers de la restauration et commerçants alimentaires spécialisés. Le métier de distribution des fruits et légumes et produits de la mer pèse 882 millions sur un total groupe de trois milliards lors du dernier exercice clos en septembre 2013. En douze ans, la part de la grande distribution dans le CA est tombée de plus de 60 % à moins de 30 %.

Déjà difficiles à mettre en œuvre à l’échelle d’un groupe intégré, ces virages stratégiques sont encore plus compliqués à orchestrer au sein d’une myriade de sociétés qui ont chacune leur propre culture. Hexagro, qui avait été créé par d’anciens crénistes en 1994, compte une cinquantaine d’adhérents dont le nombre pourrait progresser via l’arrivée d’un nombre variable d’ex Crénistes. Le chiffre d’affaires actuel de cette SA à directoire est estimé à 500 millions d’euros. Hexagro a déjà réussi son pari de livrer une gamme large et profonde spécifiquement adaptée à la RHF : fruits et légumes, produits de la mer, produits élaborés et traiteurs ou prêts à l’emploi.

Toutefois, la poche de croissance que constituait la RHF commence à s’épuiser alors que la concurrence s’affirme. Ainsi, livrer les collectivités et les restaurants est également l’un des quelques métiers de base du groupe Transgourmet. Contrôlé par Coop Suisse, il pèse plus d’un milliards d’euros de CA en France sur un total européen d’environ sept milliards. Pour la livraison de l’ultra frais, il se repose sur sa filiale All Fresh logistique. Ce dernier est un créniste. Mais il était de plus en plus à l’étroit dans son secteur du Bassin Parisien au regard des ambitions de Transgourmet qui est de couvrir le territoire national. C’était d’ailleurs une source de tension avec les autres membres de Creno.
Thierry Seguin

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