Une stabilité du marché malgré la crise

Marc Keranguéven, président de la Sica de Saint-Pol-de-Léon : « La Sica doit la bonne tenue globale des ventes à la multitude de clients et à son ouverture sur l’ensemble des marchés en France (grossistes, GMS, RHF…) et à l’export ». Photo : Emmanuel Pain
L'activité légumes se poursuit quasi normalement à la Sica de Saint-Pol-de-Léon pendant le confinement lié à la crise sanitaire du Covid-19. Le premier groupement français de producteurs de légumes s’est organisé pour assurer une continuité dans la production, le conditionnement et l’expédition des produits frais et constate une bonne tenue globale des ventes, y compris à l’export. Et ce, malgré une crise de main-d’œuvre. Le point avec Marc Keranguéven, président de la coopérative.


L’activité légumes de la Sica est-elle impactée par la crise du Covid-19 et les effets du confinement ?     

Marc Keranguéven : La Sica met en marché l’ensemble de ses volumes de légumes via le cadran, outil très sensible à tout phénomène touchant à l’offre et à la demande. Aussi, le confinement imposé à la population laissait craindre une forte baisse de la consommation. Mais globalement, depuis le début de cette période de confinement, la situation n’est pas si difficile. Nous constatons une stabilité du marché et peu d’invendus. Les prix se maintiennent pour de nombreux produits, comme la tomate et le chou-fleur. Seuls la fraise, la pomme de terre primeur, les légumes anciens, les mini-légumes et le shiitake ont vu leur prix baisser dès le début de cette période, en lien avec la fermeture de la restauration commerciale, débouché quasi exclusif pour certains de ces produits, ou en raison de la désaffection des consommateurs pour ces légumes au profit de produits alimentaires stockables. Par la suite, l’engagement des enseignes de la grande distribution à mettre en avant les produits frais français les plus pénalisés par cette crise a permis à la fraise, à la pomme de terre et au shiitake de retrouver leur place. À ce jour, seuls les légumes anciens et mini-légumes restent impactés, avec de nombreuses destructions et non-récoltes. La Sica doit cette bonne tenue globale des ventes à la multitude de clients et à son ouverture sur l’ensemble des marchés en France (grossistes, GMS, RHF…) et à l’export.
 
 
Comment la Sica fait-elle face à cette crise ? Quelles ont été les mesures prises pour poursuivre l’activité ?
M.K.: Dès l'annonce des mesures de confinement, nous nous sommes organisés pour assurer une continuité dans la production, le conditionnement et l’expédition de nos produits frais. De nombreuses dispositions ont été prises pour éviter les risques de contamination sur les exploitations légumières, au sein de la coopérative et dans les stations de conditionnement. La mise en œuvre des gestes barrières et les mesures de distanciation sont partout généralisées. Dans les serres, les producteurs imposent un travail de récolte avec deux rangs d’écart entre les personnes. Au niveau des 20 stations de conditionnement, qui emploient quelque 80 salariés, l’activité se poursuit en évitant au maximum la circulation et le croisement des employés. Les chargements et déchargements sont réalisés par une seule personne et les portes restent closes aux producteurs. À la coopérative, qui compte 120 salariés, 50% du personnel a été mis en télétravail, 20% en activité partielle tandis que 30% (service informatique et marché, maintenance…) sont restés sur site. L’ensemble des collaborateurs et des légumiers accepte les mesures imposées.
 
Cette crise sanitaire a-t-elle un impact sur l’export, activité importante pour la coopérative ?
M.K.: L’export représente en effet une très forte activité pour la Sica qui expédie selon les années entre 40 et 50 % de ses volumes de légumes (jusqu’à 60 % pour le chou-fleur) dans l’Union Européenne. Les acheminements vers l’étranger se poursuivent normalement, avec, il est vrai, des volumes de chou-fleur un peu plus faibles en mars-avril, correspondant à un creux de production observé à cette époque. Le manque de véhicules de transport ne s’est pas fait sentir. L’une des difficultés actuelles concerne l’absence de fret en raison de l’arrêt de l’activité dans de nombreux secteurs et de la contraction des échanges commerciaux qui en découle. Contrairement à une période de pleine activité économique, les camions reviennent parfois à vide, multipliant le coût du transport par deux. Ce renchérissement des tarifs du transport explique en partie la hausse de prix des fruits et légumes observée sur les étals en cette période de confinement.
 
Comment est géré le manque de main-d’œuvre en cette période de confinement ?
M.K.: La Sica fait face à une problématique structurelle de main-d’œuvre pour récolter quotidiennement et manuellement les fruits et légumes frais. Ce manque de personnel, notamment de salariés en CDI, impacte considérablement l’activité. En ce début de saison, les producteurs ont fait appel comme à l’accoutumée à une importante main-d’œuvre étrangère (de Roumanie, Bulgarie, Pologne…) pour réaliser les plantations de plein champ (échalote et artichaut notamment) et les récoltes (tomate, salades…). Après le départ d’un grand nombre de ces travailleurs saisonniers au début de la période de confinement, l’activité a pu se poursuivre grâce au recrutement de personnel par l’intermédiaire de la plate-forme Desbraspourtonassiette, lancée par l’Anefa1 et la FNSEA, avec l’appui de Pôle Emploi, du ministère de l’Agriculture et du ministère du Travail. Ce dispositif, auquel de nombreux Français privés d’activité ont répondu, a permis de pallier intégralement le manque de main-d’œuvre saisonnière. À présent, c’est le déconfinement et la reprise du travail ou des études pour de nombreux Français qui fait craindre une nouvelle pénurie de personnel dans les exploitations. Les légumiers pourront-ils encore bénéficier de la main-d’œuvre locale ? Les travailleurs agricoles étrangers reviendront-ils?  Les questions sont nombreuses à l’approche de la saison estivale…

(1) Association nationale des employeurs agricoles
 
 
La Sica de Saint-Pol-de-Léon

En chiffres

-850 producteurs
-650 exploitations
-14 000 ha de légumes de plein champ
-150 ha de légumes sous abri
-230 000 tonnes de légumes
-10 000 références en horticulture d’ornement
-120 salariés
-5000 emplois directs
-221 millions d’euros de chiffre d’affaires (en 2019)

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