En effet, pendant deux ans, une expérimentation a été menée au centre de Lanxade en partant des hypothèses suivantes : "la suppression de fleurs diminue le potentiel de fruits" et "la suppression des feuilles et des pousses de bourses entraîne un stress végétatif".
Retirer les 1res feuilles et les pousses de bourses entraîne la chute de fruits
Dans le premier cas comme dans le second, à la nouaison, une diminution significative du nombre de fruits a été observée.
En revanche, les résultats changent aux étapes suivantes. En effet, quand la moitié des fleurs est supprimée, le CTIFL observe une compensation de l’éclaircissage mécanique par une faible chute physiologique naturelle à la fructification. Ce résultat laisserait penser qu'il y a une très faible voire une absence de compétition nutritionnelle entre les fruits. À la récolte, la production est égale à supérieure au témoin, qui n’a pas connu d’éclaircissage. Il n’y a quasiment aucune incidence de réduction de la charge fruitière. Par ailleurs, le retour à fleurs est très faible.
Dans le second cas, avec la suppression des premières feuilles et pousses de bourse et la conservation des fleurs, le CTIFL a observé une très forte chute physiologique à la fructification, et une très forte compétition nutritionnelle. À la récolte, la production de fruits est très faible avec seulement 20 à 40% de fruits par rapport au témoin. La réduction de la charge fruitière est d’ailleurs trop forte. Quant au retour à fleurs, il varie entre 30 et 70% malgré cette très faible production.
De ces travaux sur le mode d'action des outils à fils, Laurent Roche a apporté les conclusions suivantes: "Le retrait des 1res feuilles et des pousses de bourse semble beaucoup plus important que le retrait des fleurs. De plus, la réduction de la surface foliaire entraîne une diminution du taux de nouaison et de fructification et est proportionnelle à l’intensité d’éclaircissage." D’après ces travaux, il a également été montré que la suppression des 1res feuilles est définitive. Par ailleurs, les 1res feuilles de rosette et/ou les pousses de bourse jouent un rôle dans le retour à fleurs du pommier.
Laurent Roche a ensuite abordé la forte autonomie nutritionnelle du corymbe, ainsi que le rôle d’organe puits de la pousse de bourse qui, retirée à la floraison, induit une chute importante de fruits à la fructification. Enfin, il a montré que l’éclaircissage mécanique n’avait pas d’impact négatif sur la pollinisation des fruits.
"Si nous mettions au point la machine parfaite qui n’enlève que les fleurs, cela serait inefficace car nous aurions le même nombre de fruits. C’est le stress physiologique qui joue", a conclu Laurent Roche.
Les diagnostics prédictifs d'Apple Genie
Cette rencontre a aussi été l’occasion pour Joan Bonany, de l'institut de recherche espagnol Irta, de nous présenter le projet Apple Genie. Il s'agit d'un système d'aide à la décision pour la maîtrise de la charge du pommier et la gestion du risque bitter pit en station et au verger. D'une durée de 36 mois, le projet devrait se clôturer en mars 2017, avec un budget de 1,6 M€. Il réunit à la fois des PME, des organismes de R&D (Irta, CTIFL, Unibo en Italie et PFR en Nouvelle-Zélande) et des utilisateurs finaux tels que Cofruid’Oc ou Granfrutta Zani. Apple Genie fournit des diagnostics prédictifs basés sur l’expression des gènes pour une évaluation rapide de la charge des arbres et du bitter pit.Un article approfondi de cette rencontre technique paraîtra dans L'Arboriculture fruitière Les Enjeux n° 24 de Mai.